1. Vaccin (Lancet, NEJM, FDA)
Dans le lien suivant, une présentation de la FDA sur la situation épidémiologique désastreuse aux Etats-Unis de la COVID arrêtée au 8 décembre:
https://www.fda.gov/media/144330/download
Depuis, les Etats-Unis ont dépassé les 300.000 morts et la France va atteindre les 60.000 morts…. en l’espace de 9 mois. On peut continuer à compter les morts, ou regarder attentivement les résultats des essais sur les vaccins.
Le Lancet a publié ceux du vaccin d’Astrazeneca (insertion d’une partie des séquences génétiques de la protéine spike du coronavirus à un adénovirus).
https://marlin-prod.literatumonline.com/pb-assets/Lancet/pdfs/S0140673620326611.pdf
Le NEJM vient de publier ceux concernant le vaccin ARNm, de Pfizer qui semble bien plus efficace et sera probablement le premier autorisé en France.
https://www.nejm.org/doi/pdf/10.1056/NEJMoa2034577?articleTools=true
Plus intéressant, la FDA a publié son rapport d’évaluation sur le vaccin Pfizer, au cours d’un comité consultatif d’experts:
https://www.fda.gov/media/144245/download (doc complet)
https://www.fda.gov/media/144337/download (ppt pour ceux qui n’ont pas le temps)
Ainsi que celui sur le vaccin Moderna :
https://www.fda.gov/media/144434/download
Pour les internes qui nous lisent et les non-initiés:
Ce qu’il faut lire dans les rapports de la FDA ou prochainement de l’EMA (l’Agence Européenne du Médicament), c’est la partie sur la balance Bénéfice/Risque. C’est en fait la balance entre les certitudes et les incertitudes que l’on a sur l’efficacité et la sécurité du vaccin. Les certitudes proviennent des résultats des essais, en l’occurrence une efficacité à 95% pour les 2 vaccins à 2 mois sur les cas de COVID symptomatiques, à priori similaire dans l’ensemble des sous-groupes étudiés (celui de Moderna aurait une efficacité un peu moins élevée chez les + de 65 ans, 86%), ainsi que sur les cas de COVID sévères (30 cas sévères versus 0 pour le vaccin Moderna), et des effets secondaires à priori minimes (cas de lymphadénopathies, rares cas de paralysie de Bell), à moins d’une petite cachoterie nichée dans les annexes des essais cliniques.
Ces certitudes doivent être mettre en perspective avec les incertitudes : durée d’immunité (niveau d’IgG protecteur ?), efficacité sur la mortalité ou les hospitalisations, efficacité sur la contagiosité du virus (pas de sérologie faite dans l’essai) malgré la vaccination, efficacité chez les personnes antérieurement infectées, efficacité chez les personnes très âgées, notamment en EHPAD qui seront pourtant les premières à être vaccinés ; effets indésirables rares non détectables à l’échelle des essais, potentiellement neurologiques, inflammatoires, voir des réactions auto-immunes ou anaphylactiques…. Et oui, comme disent les anglais, « we don’t know what we don’t know » (nous ignorons ce que nous ignorons).
Et c’est le niveau d’incertitude, s’il est jugé acceptable par rapport aux certitudes, qui déterminera l’autorisation de mise sur le marché. Si l’octroi de l’AMM ne fait aucun doute vu la situation sanitaire, l’indication retenue et les populations-cibles à prioriser feront l’objet de débats passionnés, bien qu’apparemment tout est déjà calé par l’exécutif. Réponse européenne le 21 décembre.
D’ici là, nous verrons comment cela se passe la vaccination chez nos amis anglais, américains ou canadiens. Quoiqu’il en soit (ou qu’il en coûte, c’est selon) tout cela nécessitera beaucoup de pédagogie et de transparence de la part des autorités (nationales et régionales) si les AMM sont accordées et que la vaccination se veut massive en France et Outre-mer.
2. Masques (Annals of Internal Medicine, BMJ)
Etrange polémique à propos d’une étude danoise sur les masques, DANMASK-19, qui a inclus 3030 personnes en avril et mai dernier randomisés entre fourniture de masque et recommandations précises d’utilisation versus un groupe contrôle (à l’époque le masque n’était pas la norme). Il y a eu 42 cas de COVID dans le groupe masque contre 53 (OR : 0.82 ; IC95% : 0.54 to 1.23; p = 0.33) et les auteurs concluent que le masque ne réduit pas la transmission du virus.
Les auteurs se sont plaint que les grandes revues ont refusé de publier leur travail mais ont communiqué leurs résultats via les réseaux sociaux avant relecture par les pairs. Un commentaire du BMJ souligne fort justement que l’étude ne permet pas de conclure, et si vous lisez la partie statistique (pour une fois) de l’article, vous verrez qu’il était nécessaire de recruter 6000 personnes pour mettre en évidence une réduction de moitié du taux d’infection (ce qu’on appelle la puissance d’une étude). On est loin du compte, mais bien entendu, les antimasques se servent de l’article comme un étendard alors qu’il ne démontre rien.
https://www.acpjournals.org/doi/full/10.7326/M20-6817
https://www.bmj.com/content/371/bmj.m4586
3. Raoultlexii megalomanis sp (NEJM, Medrxiv)
Pas une semaine ne se passe sans qu’une étude négative sur l’hydroxychloroquine ou l’azythromycine ne soit publiée, en prévention ou en curatif … Nouvelle étude dans le NEJM, étude HYCOVID du CHU d’Angers en préprint, bras azythromycine de l’essai RECOVERY… Et toujours aucun mea-culpa du Pr Raoult et de ses acolytes Perronne et Fouché… Dommage, on peut apprécier le personnage, qui en devient inaudible sur d’autres sujets, et cela vient ternir une carrière scientifique et universitaire exceptionnelle par ailleurs. Avec, pour les internes qui ne le savent pas, des découvertes majeures sur les virus géant… et des bactéries à son nom (Raoultella planticola et Rickettsia raoultii).
https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMoa2021801
https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2020.10.19.20214940v1.full.pdf
https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2020.12.10.20245944v1.full.pdf
4. Pendant ce temps-là… (NEJM)
Le NEJM continue de soutenir mordicus le remdesevir (cf édito), malgré l’essai SOLIDARITY, avec pour argument que le médicament serait en fait efficace mais seulement à certains stades de l’infection… on connait la chanson… A lire donc.
https://www.nejm.org/doi/pdf/10.1056/NEJMoa2023184?articleTools=true
https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMe2034294
5. Insuline à longue durée d’action (NEJM)
En diabétologie, une étude randomisée en double-aveugle a comparé une insuline hebdomadaire dénommée icodec à l’insuline glargine chez 247 patients DT2 indemnes de traitement insulinique. La baisse d’HbA1c était de 1,33% sous icodec versus 1,15% sous glargine (HbA1c initiale à 8%), soit une différence de 0,18% non significative (IC95% : -0,38 – 0,02, p=0,08). Aucune différence sur l’incidence des hypoglycémies ou autres événements indésirables. La glargine quotidienne a donc du souci à se faire.
https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMoa2022474
6. Hydroxychloroquine et lupus (JAAD)
Une étude épidémiologique danoise (n=4587) suggère que la prescription d’hydroxychloroquine serait associée à une diminution du risque de MACE (Infarctus du myocarde, AVC et mortalité CV) de 35% (IC95% : 0.46–0.90) dans le lupus systémique. Pas si « cardiotoxique » que ça l’HCQ.
https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0190962220331637
7. Fascinant bypass (Plos Medicine, Clinical Imaging, JAMA)
En obésité, une méta-analyse du mois a poolé les résultats d’études de chirurgie bariatrique de 1.539.904 patients, dont 269.718 avaient bénéficié de la chirurgie. Ces patients ont eu une réduction :
– de 38% (IC95% : 0,55-0,69) sur la mortalité totale,
– de 50% (IC95% : 0,35-0,71) sur la mortalité CV,
– de 61% (IC95% : 0,35-0,71) sur la survenue d’un DT2 (IC95% : 0,18-0,83),
– de 64% (IC95% : 0,32-0,40) sur l’HTA.
En complément, un autre article qui est censé sortir en avril 2021 vous expliquera tout sur les techniques de “laparoscopic Roux-en-Y gastric bypass », « sleeve gastrectomy », and « laparoscopic adjustable gastric banding », ainsi que les risques de complications associées, dont on parle moins. C’est fascinant ce que l’on arrive à faire en chirurgie bariatrique et les images sont très jolies. Et le gastric bypass serait tellement ingénieux, selon l’aphorisme de mon Maitre spirituel JJA, « qu’il permettra bientôt de relier directement l’œsophage au trou du cul ». Perte de poids garantie.
Enfin, pour les patients qui ne pourraient bénéficier de la chirurgie bariatrique, il existe un nouveau système aux Etats-Unis de ballon gastrique par voie endoscopique (jusqu’à 3 ballons dans l’estomac pour les plus gourmets), mais l’article du JAMA montre bien que ce n’est pas aussi efficace que le bypass.
https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0899707120304514?via%3Dihub
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7386646/
https://jamanetwork.com/journals/jama/fullarticle/2773551