Partage

Sentinelles971

Le blog d'information des Médecins Généralistes de Guadeloupe

Vous consultez actuellement : Maladies Infectieuses

Connaissez-vous le pou d’agouti?

Le pou d’agouti est le nom vernaculaire guyanais d’un acarien (Trombicula canis), de la famille des Trombiculidae et proche des aoûtats.

pou agouti

Les larves de ce petit acarien de couleur rouge mesure environ 0,2 mm et à un comportement de piqueur-suceur.
Accrochées à l’extrémité des feuillages, elles se laissent emporter par un hôte de passage, auquel elles se fixent et dont elles se nourrisent , durant 2 à 10 jours, le temps que le parasite se détache par lui-même pour finir son cycle de vie dans le sol.
Elles apparaissent comme de petits points rouge vif au milieu d’une lésion maculo-papuleuse très prurigineuse, aux zones de friction vestimentaire, en particulier aux endroits où les vêtements sont serrés (sous-vêtements, ceintures, chaussettes…) et dans les plis où la peau est plus fine (aisselles, coudes, genoux…)
Le prurit intense peut être insomniant, et persister plusieurs jours après la disparition du parasite.

– En préventif: en Guyane, on utilise l’huile de touloucouna ou carapa (à ne pas confondre avec carapate).
– En traitement: on utilisait l’Ascabiol® (quand il était encore sur le marché…) et maintenant le Sprégal®, qui à l’avantage de se pulvériser sur les piqures (Attention: chez les jeunes enfants et en cas d’asthme)
PS: En Guyane, certains utilisent le Baygon® (que je ne recommanderais pas… ) qui parait-il stoppe instannément le prurit (en tuant la larve?)
– En symptomatique: les anti-histaminiques et les dermo-corticoides peuvent être proposés avec une action modérée semble-t-il.

Ma petite expérience personnelle:
A plusieurs reprise, 24 à 48h après des randonnées avec bain en rivière en Basse-Terre, apparition au niveau des élastiques du maillot de bain, mais aussi du dos de papules prurigineuses +++ (prurit intermitent aggravé par le grattage).
OLYMPUS DIGITAL CAMERA
Avec Ascabiol® ou Sprégal®, le prurit disparait en 3-4 jours, et les papules en 8-10 jours.
Pensez-y en cas d’éruption prurigineuse après une sortie en rivière.

Sources:
Mémoire du Dr C.COQUET pour l’obtention de la capacité en médecine tropicale, Montpellier 2004
CHIPPAUX et collaborateurs. Facteurs biotiques intervenants dans la santé en Guyane. Liste des agents pathogènes, des vecteurs, des animaux réservoirs et sources de nuisances. Rapport synthétique. ORSTOM. Documents internes.1982. p 36 – 38

Reco suivi patients VIH.

Mise à jour de juin 2014 de la fiche récapitulative du calendrier de suivi du patient VIH: fréquence et type de bilan (clinique, biologique, dépistage, examens complémentaires…) en fonction du profil du patient (traitement en cours, taux de CD4, pathologies associées…)
Un outil qui rend service…

A noter: un DU Infection par le VIH est proposé par la faculté de Médecine de Guadeloupe à la rentrée 2014.

Reco. infections urinaires.

La SPILF (Société de Pathologie Infectieuse de Langue Française) a réactualisé ses recommandations sur Diagnostic et antibiothérapie des infections urinaires bactériennes communautaires de l’adulte.
On retiendra:
Le diabète même insuliné n’est pas un facteur de complication
CYSTITE: 
– toujours pas d’indication de l’ECBU
fosfomycine-trométamol (Monuril ® ou Uridoz®), en 1ère intention
– les fluoroquinolones sont à éviter pour des raisons de résistances
– pages 15 et 17: prise en charge des cystites récidivantes (>4 /an)
PYELONEPHRITE:
– ECBU +/- échographie
prise en charge ambulatoire en absence de signes de gravité (page 25)
fluoroquinolones (per os) en 1ère intention en probabiliste, à adapter à l’ECBU, 10-14 jours
– suppression de l’ECBU de contrôle en cas d’évolution favorable
CHEZ L’HOMME (page 30)

Compte rendu de l’EPU Chikungunya.

L’EPU du 20/03/2014, organisée par l’ARS, c’est divisée en 3 parties:
1ERE PARTIE: MEDICALE, présentée par le Pr HOEN du service de maladies infectieuses du CHU, avec:
a) Rappel des 3 phases de la maladie (forme typique non compliquée) et de la prévalence des signes cliniques
• phase aigue, fébrile, qui dure environ 5 jours, avec des arthralgies (signe constant)  +/- associé à des oedèmes +/- un rash morbiliforme.

chik artic
dengue versus chik

phase de convalescence: apyrétique, avec une asthénie, des arthralgies persistantes +/- une éruption papulo-maculause +/- prurit notamment des paumes et palmes.
phase chronique (30 à 60% des cas), avec des arthrites récidivantes, et comme facteurs de risque identifiés: un age > 45 ans, des arthrites intenses à la phase aigue, des ATCD rhumato.

b) Le diagnostic est avant tout clinique, et dès que vous aurez vu une dizaine de cas vous les reconnaitrez à leur démarche (de la gêne à la marche, type boiterie, jusqu’au besoin d’être soutenu par les accompagnants pour se déplacer).
Le diagnostic biologique est à réserver aux formes atypiques ou doute diagnostic (notamment avec dengue, leptospirose, primoinfection VIH…polyarthrites…)
Par ailleurs la biologie montre en général une lymphopénie (inférieure à 1000, en moyenne 850), une absence de thrombopénie, et une CRP aux environs de 50.
Le score clinico-biologique ci-dessous a été proposé (il n’est cependant pas encore validé).

score chik
c) La prise en charge est principalement ambulatoire.
Les critères d’hospitalisation ne sont pas spécifiques (imposibilité au maintien à domicile, déshydratation, AEG, forme grave… décompensation d’une co-mobidité, complication iatrogène, nourrisson fébrile <3 mois, syndrome hyper-algique non gérable à domicile notamment pour les enfants…) sauf dans le cas de la femme enceinte proche du terme.
En effet s’il y a une situation à risque c’est la transmission du virus à l’enfant au cours de l’accouchement (50% des cas, avec 50% de formes graves parmi lesquelles 50% gardent des séquelles notamment neurologiques).
Thérapeutique:
• en aigu: hydratation et paracétamol (aux posologies adaptées au poids).
En 2ème intention antalgiques de palier 2 voire 3 (en respectant les AMM: tramadol >3 ans, et codeine >12 ans). AINS et aspirine sont contre-indiqués.
• en post-aigu: antalgiques de palier 1, 2, voire 3.
AINS en 2ème intention en cures courtes, voire corticoides.
.
2EME PARTIE: EPIDEMIOLOGIQUE présentée par le Dr Sylvie CASSADOU, médecin épidémiologiste à la Cire Antilles-Guyane.
courbe chikAvec un essai de projection à l’echelle de la Guadeloupe, de ce que pourrait être l’épidémie chez nous en s’appuyant sur la courbe épidemiologique de l’épidémie de la Réunion, avec:
– une 1ère période de avril à décembre 2005, avec entre 100 et 350 cas/semaine
– une 2ème période «explosive», avec passage en 1 mois de 400 à 10 000 cas/semaine, puis 15 jours apres le pic de 47 000 cas/semaine !!! et ensuite une décroissance sur 6 mois.
A la Réunion, on estime que l’épidémie 2005-2006, a touché 33% de la population, soit 266 000 personnes, avec 250 cas graves, 44 cas de transmission materno-néonatale et un « excès » de 250 décès sur la période.
Pour le moment en Guadeloupe, on recense entre 150 et 200 cas/semaine. L’épidémie de dengue prend fin, et la saison sèche commence. On espère une ascension lente du nombre de cas, mais les choses risquent de changer avec l’été et la conjonction pluie + chaleur… comme cela a été le cas à la Réunion (où hémisphère Sud oblige, l’été est en décembre).
.
3EME PARTIE: « GESTION DE LA CRISE à venir», présentée par le Dr Patrick SAINT MARTIN, pharmacien, et Directeur du pôle de Veille Sanitaire à l’ARS.
Pour extrapoler à la Guadeloupe (400 000 habitants), l’épidemie pourrait concerner 132 000 personnes, avec dans le cas d’un pic de même ampleur, un pic de 23 000 cas/semaine !!!
Le chikungunya étant une pathologie qui necessite rarement l’hospitalisation (250 cas graves à la Réunion), la prise en charge sera essentiellement ambulatoire.
L’ARS estime que les 340 médecins généralistes en activité de Guadeloupe, atteindront leurs « limites d’absorption » du phénomène vers 1000 cas/semaine.
L’ARS réfléchi donc à l’organisation de dispositifs faisant appel par exemple aux:
– professionnels de santé de la réserve sanitaire, gérée par l’EPRUS (Etablissement de Préparation et de Réponse aux Urgences Sanitaires) qui existe depuis 2007, suite justement à la crise sanitaire provoquée par l’épidémie à la Réunion.
– infirmiers de ville, en utilisant les moyens de télémédecine et e-prescription (en cours de discussion avec l’Ordre)
– médecins retraités
– médecins salariés (PMI, scolaires, travail…)
.

Clinique: Chikungunya versus Dengue.

dengue versus chik

On retiendra aussi concernant:
 l’éruption:
• dans le Chikungunya: précoce, de type maculo-papuleuse, prurigineuse (comme une allergie), notamment au niveau des paumes et plantes.
• dans la Dengue: en général vers J5 (avec la chute de la fièvre), de type rash diffus (comme un coup de soleil), qui sur peau claire garde l’empreinte des doigts quelques secondes après la fin de la pression.

 les arthralgies du Chikungunya, intéressent les extrémités, avec des signes +/- inflammatoires (œdèmes, rougeur).

chik artic

Guadeloupe, février 2014: 3 épidémies en cours.

3 épidémies virales, sont actuellement en cours en Guadeloupe:

• DENGUE (DEN4), depuis mai 2013, en phase de décroissance.
dengue fev 2014Pour plus d’informations, le point épidémiologique Dengue, du 14 février 2014

• CHIKUNGUNYA, depuis fin décembre 2013, avec 476 cas probables ou confirmés, et une estimation de 1460 cas cliniquement évocateurs, principalement répartis à Baie-Mahault, puis Petit-Bourg, et Goyave.
chik fev 14 2Pour plus d’informations, le point épidémiologique Chikungunya, du 27 février 2014, dont est issu le diagramme ci-dessus.

• GRIPPE (AH3 et AH1N1), depuis fin janvier 2014.
grippe fev 2014Pour plus d’informations, le point épidémiologique Grippe, du 14 février 2014, dont est issu le diagramme ci-dessus.

Point sur la SYPHILIS.

RAPPELS ÉPIDÉMIOLOGIQUES:
Depuis 2000, la syphilis ne fait plus partie des maladies à déclaration obligatoire, alors que paradoxalement on note une recrudescence en France depuis cette date.
En Guadeloupe, nous avons eu une épidémie en 2001 avec 38 cas sur l’année (contre 20 cas entre 1993 et 2000) chez des personnes en grande précarité.
L’étude REGLIST de ORSAG en 2010, en Guadeloupe, estimait la prévalence à 2.3%.
En Martinique, on retrouve également une épidémie entre 2004 et 2008 (55 cas) touchant le même type de population avec un 1er pic en 2005 (11 cas) et un second en 2007/2008 (35 cas).

CLINIQUE:
La syphilis est une infection sexuellement transmissible (IST) contagieuse, due au tréponème pâle.
A juste titre appelée « la grande simulatrice » elle provoque des symptômes:
– non spécifiques
– qui évoluent spontanément vers la guérison
– peuvent passer inaperçus, notamment la lésion initial (chancre) chez la femme, ou au niveau de la sphère ORL
– peuvent être confondus (éruptions virales…)

NOTE BENE : Nous n’aborderons pas ici la question de la syphilis congénitale

DEPISTAGE et DIAGNOSTIC SEROLOGIQUES,utilisent l’association de tests sérologiques:
– non spécifique: la recherche d’antigène non tréponémique avec le VDRL (Venereal Disease Research Laboratory)
– spécifiques: la recherche d’antigène tréponémique avec le TPHA (Treponema pallidum Haemagglutination Assay) et le FTA (Fluorescent Treponemal Assay, qui nécessite un microscope à fluorescence) particulièrement utile au tout début du chancre.

En France, la stratégie de dépistage associe TPHA + VDRL (coté B20 = 6.2 euros). En cas de réaction positive ou dissociée, un titrage doit être pratiqué (B30 = 9.3 euros).

INTERPRETATION:

syphilis sero

Si ce n’est toujours pas clair… et on peut comprendre… 🙂 je suis la 1ère à sortir mon organigramme… Référez vous aux cas cliniques de cet article du département de médecine générale de Paris7.

DEFINITION DE CAS EPIDEMIOLOGIQUES (basée sur la clinique et la biologie)
– Syphilis primaire :
• une ou plusieurs ulcérations de type syphilitique (chancre)
• et soit mise en évidence de Treponema pallidum dans des prélèvements (par un examen au microscope à fond noir, par immunofluorescence directe ou méthodes équivalentes) → cas certain.
soit test sérologique positif (VDRL, TPHA ou FTA) → cas probable.

– Syphilis secondaire:
• lésions cutanéo-muqueuses localisées ou diffuses souvent associées à des adénopathies. Le chancre peut être présent.
• et soit mise en évidence de Treponema pallidum dans des prélèvements (par un examen au microscope à fond noir, par immunofluorescence directe ou méthodes équivalentes) → cas certain.
soit VDRL positif associé à un FTA ou TPHA positif → cas probable.

– Syphilis latente :
• absence de signes cliniques
• et soit un VDRL positif et un FTA ou TPHA positifs , sans antécédents connus de syphilis,
soit un antécédent de syphilis traitée, associée à VDRL avec un titre ≥ 4 fois le précédent.

Le stade est définie comme précoce si on retrouve au moins un des critères suivants dans les 12 derniers mois  :
− séroconversion documentée ou augmentation ≥ 4 du VDRL
− signes cliniques compatibles avec une syphilis primaire ou secondaire
− partenaire sexuel avec une syphilis primaire ou secondaire probable ou certaine ou une syphilis latente précoce probable
− sérologies positives tréponémiques et non tréponémiques chez une personne dont la seule exposition sexuelle possible a eu lieu dans les 12 derniers mois.

ƒƒƒƒTRAITEMENT:  traitement syphilis (mise à jour 10/02/2014)
et il semble que la BENZATHINE BENZYLPENICILLINE 2.4 MUI (anciennement EXTENCILLINE) fasse son retour dans les officines à partir d’avril 2016… à vérifier…

SURVEILLANCE
Sérologique à 3, 6, 12, et 24 mois de la diminution significative du VDRL, critère de guérison: VDRL divisé par 4 à 3 mois et négativé à 1 an si syphilis précoce, à 2 ans si syphilis tardive.

Pensez au dépistage des autres IST: VIH à 6 semaines, AgHBs, Ac-antiVHC, PCR Chlamydiae…

Sources:
– Diagnostic sérologique de la syphilis INVS 2004
– Article du département de médecine générale de Paris7 sur Sérologie de la syphilis, quand traiter?
–  traitement syphilis (mise à jour 10/02/2014): Alternatives pour le traitement des syphilis non neurologiques dans un contexte de rupture de stock de benzathine pénicilline +/- doxycycline. Communiqué commun de la Société de Pathologie Infectieuse de Langue Française (SPILF), de la Société Française de Dermatologie (SFD), du Collège des Universitaires de Maladies Infectieuses et Tropicales (CMIT) et de la Société Française de Lutte contre le SIDA (SFLS).